Chère Mme Alena Douhan, rapporteur spécial des Nations Unies dans les affaires des sanctions,
Nous sommes heureux que vous ayez pu, en tant que rapporteur du Conseil des Droits de l’Homme de Nations Unies, visiter l’Iran pour « vérifier le non-respect éventuel des droits de l’homme suite aux sanctions imposées unilatéralement ».
Non seulement cette visite peut être le prélude d’une diminution des sanctions qui pèsent sur la vie de millions d’iraniens, mais elle est également efficace en vue de normaliser les relations internationales avec l’Iran et crée le lit nécessaire pour des discussions multilatérales à long terme entre la République islamique d’Iran et la communauté internationale.
La République islamique fuit le dialogue et n’accepte pas les règles internationales. Dès lors, la présence des rapporteurs spéciales des Nations Unies dans le pays peut renforcer la pression sur le régime afin qu’il change ses attitudes.
Comme vous le savez, après des années de demandes par la société civile, des militants politiques et les nations unies, le rapporteur spécial des droits de l’homme n’a toujours pas été autorisé à entrer en Iran.
Les jours de votre présence en Iran ont coïncidé avec des manifestations de contestions contre la vie chère et le manque de produits de premières nécessités dans différentes régions du pays. Ces mouvements continuent et ressemblent fort aux soulèvements de l’année 2019 contre l’augmentation du prix du carburant avant leur répression dure et violente. Le régime avait alors coupé toute possibilité de communication avec l’extérieur.
Ces exemples sont les réactions générales les plus visibles à une crise économique croissante ces dernières années. La crise qui au fil des années a plongé une grande partie de la population iranienne dans la pauvreté, le chômage et l’impossibilité d’avoir accès à ses besoins les plus essentiels.
La raison centrale de cette crise économique est la nature même de la République islamique. Le gouvernement, dont la corruption est une partie importante de sa structure économique, effectue des dépenses idéologiques et militaires qui pèsent lourdement sur le peuple iranien.
Dans une telle situation, imposer en plus des sanctions unilatérales sur le peuple iranien a rendu les choses plus difficiles. Au cours des cinq dernières années, et de surcroit après le retrait unilatéral des Etats Unis de l’accord sur le nucléaire, la valeur de la monnaie nationale de l’Iran a chuté d’un dixième, ce qui a redoublé la précarité imposée au peuple.
Nous, en tant que parti politique d’opposition iranien, considérons que ces sanctions n’aident pas à la transition du régime mais au contraire imposent des pressions supplémentaires au peuple iranien. A notre avis, la poursuite des politiques régionales de la république islamique, son insistance sur le programme nucléaire et le développement de son programme d’armement montrent bien que les sanctions n’ont eu d’effet ni sur le régime ni sur ses projets mais plutôt sur le peuple iranien.
Nous considérons que les moyens de subsistance, la dignité, les besoins fondamentaux de la vie et des droits de l’homme pour le peuple iranien ne devraient pas être victime du conflit entre république islamique et la communauté internationale. Ces sanctions peuvent non seulement mettre en danger la sécurité alimentaire et humaine du peuple iranien, mais elles peuvent également mettre en péril son droit d’avoir accès à l’hygiène et à des soins médicaux décents (même pendant la propagation du virus Covid-19) et causer des dégâts nocif et irréparables à l’environnement.
La poursuite des sanctions met en danger le droit d’avoir un environnement sain et de l’air pur, non seulement pour les Iraniens mais aussi pour les habitants des pays voisins ainsi que pour les générations futures. L’obligation de consommer le pétrole national a provoqué une pollution de l’air et des sols dans différentes villes de l’Iran.
Les crises énumérées ci-dessus ne sont pas les seuls dégâts causés par les sanctions. Ces dernières ont favorisé une économie corrompue et également renforcé les factions fondamentalistes dans la structure du pouvoir de la République islamique. Les cercles du pouvoir proche du guide suprême et en relation avec les gardiens de la révolution, en utilisant les opportunités fournies par les sanctions et les obstructions subséquentes des chemins économiques conventionnels, sont devenus les seuls maitres de la politique et de l’économie en Iran et peuvent ainsi opprimer toute résistance.
La crise économique exacerbée pendant les sanctions a ramené la classe moyenne de l’Iran à l’abime. Ce fait s’accompagne de la rupture des relations internationales des Iraniens, qu’il s’agisse d’une interdiction de voyage des Iraniens aux Etats-Unis lors de la présidence de Donald Trump, ou après cette époque du sentiment propagé par la République islamique que les Iraniens doivent se passer de la communauté internationale suite aux sanctions. Ce sentiment prive la société civile et les mouvements sociaux des soutiens internationaux nécessaires à une transition paisible et démocratique du pouvoir.
Votre présence en tant que rapporteur spécial des Nations Unies en Iran pourrait offrir un dialogue direct avec les individus, les organisations de la société civile et les organisations non gouvernementales qui luttent contre cette situation. Ces dialogues et discussions peuvent continuer même après votre retour de l’Iran grâce aux moyens technologiques et réseaux sociaux.
Bien que la République islamique tente de priver les rapporteurs des Nations Unies de ces possibilités, nous demeurons témoins de 42 années de mensonges du régime. Il est nécessaire d’organiser des entretiens avec des individus et institutions indépendantes afin de constituer un rapport détaillé sur l’impact des sanctions.
Madame Douhan, les sanctions unilatérales ont provoqué un effet destructeur direct sur des nombreux groupes vulnérables et d’autre part servent de prétexte au régime afin de dissimuler son incompétence et de réprimer les droits de l’homme.
Le Parti de Gauche d’Iran (Fédayin du Peuple), en accueillant favorablement la désignation d’un rapporteur spécial chargé d’enquêter sur l’impact des sanctions unilatérales sur les violations des droits de l’homme, exprime son intérêt pour la poursuite de nos échanges sur les effets des sanctions directes et indirectes. Nous espérons que la présence du Représentant spécial des Nations Unies sur les droits de l’homme en Iran sera également facilitée.
Bureau des relations internationales de Parti de Gauche d’Iran (Fédayin du Peuple)
le 31mai 22
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